Dès qu’on ouvre un fil d’actualité, tout semble se bousculer. Infos, images, alertes, réactions… À force d’être exposé à tout, tout le temps, on finit parfois par ne plus comprendre grand-chose. Dans ce climat saturé, une forme de narration revient en force : la vidéo explicative. On la croise sur les comptes de France Info, d’Arte ou de Brut, et elle s’impose comme un format qui permet enfin de reprendre le fil, de poser les bases, de comprendre vraiment.
Filtrer sans déformer : un remède à la saturation
Selon l’étude annuelle du Reuters Institute for the Study of Journalism (2023), 41 % des Français déclarent éviter l’actualité de façon intentionnelle, évoquant le stress, la fatigue ou la complexité comme principaux freins. Ce chiffre, en hausse depuis 2017, témoigne d’un malaise face à un flux constant qui ne laisse plus de place à la digestion de l’information.
C’est là que la vidéo explicative prend tout son sens. Contrairement aux formats « à chaud » qui déversent l’info brute, elle structure, contextualise et surtout, donne des repères. Elle répond à une attente : celle de mieux comprendre, sans forcément lire des pages d’analyses ou passer des heures sur un sujet.
Une grammaire simple, mais exigeante
La force du format tient dans sa structure claire : un fil narratif logique, un rythme bien pensé, des visuels au service du propos. On commence par une question ou un constat, on déroule les faits, on illustre par des exemples, et on termine parfois sur une ouverture. Pas de voix triomphante, pas de suspense inutile. Juste une volonté de clarifier.
Loin d’être un gadget de réseaux sociaux, ce type de vidéo s’intègre dans une tradition journalistique française bien connue : « Le Dessous des cartes », diffusé depuis 1990 sur Arte, illustre parfaitement ce souci de pédagogie. Grâce à des cartes animées et une voix posée, l’émission permet de comprendre des enjeux géopolitiques complexes en quelques minutes. Aujourd’hui, ce principe se décline au format numérique.
Comprendre vite, mais pas à moitié
La vidéo explicative est souvent courte — entre 2 et 5 minutes — mais cela ne signifie pas qu’elle survole le sujet. Au contraire, elle demande une préparation minutieuse : documentation sérieuse, script clair, visuels bien choisis, voix off professionnelle. Dans certaines rédactions comme Le Monde ou France Télévisions, des cellules entières sont dédiées à la production de ces formats.
C’est cette rigueur qui fait la différence. Une vidéo mal documentée ou trop simplifiée décrédibilise vite son message. À l’inverse, une production bien conçue peut expliquer, en 3 minutes, les fondements du vote européen ou les ressorts d’une crise énergétique.
Une audience jeune, mais exigeante
Contrairement aux clichés, les jeunes ne se désintéressent pas de l’actualité. D’après Médiamétrie et l’INA (mars 2023), près de 60 % des 15-34 ans s’informent via la vidéo. Ils privilégient les formats courts, dynamiques, mais aussi construits. La vidéo explicative coche toutes les cases : on y trouve de la clarté, une identité visuelle soignée, et surtout une ligne éditoriale.
YouTube Shorts, TikTok, Instagram Reels… ces plateformes ont intégré le format, mais ne le dictent pas. Ce n’est pas le tempo qui fait la qualité, c’est la capacité à vulgariser sans infantiliser. Et là-dessus, certaines ONG, des enseignants ou même des institutions comme la Banque de France l’ont bien compris.
Un outil pédagogique au-delà de l’actu
Ce format dépasse largement le cadre de l’actualité. Il est utilisé en éducation aux médias, en classes de lycée, ou encore dans des campagnes de sensibilisation. Comprendre le fonctionnement du Sénat, les bases du changement climatique, ou encore le concept d’économie circulaire — tout cela passe aujourd’hui par la vidéo explicative.
Et ce n’est pas un effet de mode : c’est une adaptation à un public qui préfère l’image au texte, sans vouloir renoncer à la qualité de l’information.
À l’heure où l’information est partout mais la compréhension plus rare, la vidéo explicative apparaît comme une réponse concrète à une crise silencieuse : celle de l’attention. Elle ne prétend pas tout dire ni tout résoudre, mais elle remet les faits en ordre, permet de souffler, et surtout, elle redonne du sens.
Dans un monde où l’on zappe, elle aide à raccrocher les wagons. Et parfois, c’est tout ce qu’il faut pour recommencer à s’informer.